Dans son livre La France pour la vie, Nicolas Sarkozy se défend de toute « inimitié » à l’égard du président de la République. On se pince ! Car les journalistes politiques du Point peuvent attester de la violence des attaques de l’ancien président à l’égard de François Hollande « non pas sur le politique mais sur l’homme » (sic). Le comportement privé de François Hollande lui inspire le dégoût, notamment le traitement infligé à son ex-compagne Valérie Trierweiler. Sur ce terrain, il retient toutefois ses coups. On retrouve certes, dans son livre, un passage où il mentionne « l’ex-première compagne » pour en prendre la défense. « Je n’ai pas aimé, écrit-il, que l’on fît de Valérie Trierweiler le bouc émissaire idéal, car placée dans cette situation bancale dont elle n’était pas responsable, elle ne pouvait pas se défendre. »
Il évoque plus loin les obsèques de Mandela où tous deux étaient présents. Une occasion pour lui de souligner la duplicité de son adversaire qui, tout en jurant ne pas vouloir faire de déclaration à la presse, se serait précipité pour en faire une à l’approche des micros. Ce que Nicolas Sarkozy ne raconte pas dans ce livre – mais qu’il narre en privé –, c’est le comportement, à ses yeux, choquant de Hollande vis-à-vis de Valérie Trierweiler ce jour-là. « Il marchait devant elle comme si elle n’existait pas, confiait-il au Point. Il passait les portes, sans lui laisser la priorité. Lors du cocktail, il a fallu que ce soit moi qui m’occupe d’elle, qui la présente aux leaders mondiaux. Lui ne la calculait pas. »
L’argent ? La « névrose » de Hollande
Hollande, pour Sarkozy, c’est l’homme qui ment. Et qui arrache sa victoire sur un mensonge. Il prétend ne pas l’avoir sous-estimé. On en doute. Il s’explique sur sa relative passivité lors du débat de l’entre-deux tours : un conseil que lui aurait prodigué Valéry Giscard d’Estaing le matin même, conjugué à la perte de l’habitude du combat mano a mano après cinq ans de présidence où l’on voit les choses de plus haut.
Il affuble, page 42, François Hollande d’une « névrose » s’agissant de l’argent des riches que l’homme de Solférino prétendait ne « pas aimer ». « L’argent est un moyen qui ne mérite ni tant d’indignité ni tant de révérence », écrit Nicolas Sarkozy.
Pourquoi Sarkozy est-il si susceptible ?
L’ancien chef de l’État revient sur cette scène qu’il n’a toujours pas digérée : le passage de témoin à l’Élysée. « Notre entretien est amical, écrit-il. Il me tutoie et me demande même de lui téléphoner au cas où j’aurais quelque problème que ce soit. (…) Il me promet de trouver une sortie digne pour deux ou trois de mes anciens collaborateurs au premier rang desquels j’avais mis Xavier Musca. Naturellement, il n’en fera rien. » Mais ce qui choque Sarkozy, c’est le côté glacé (« à la limite de la mauvaise éducation ») de François Hollande dès qu’ils sont en public, sur le perron de l’Élysée. Lui reste sur l’estomac la scène où François Hollande et Valérie Trierweiler tournent les talons avant que Nicolas Sarkozy et Carla Bruni n’aient eu le temps de pénétrer dans leur véhicule.
Là, il faut s’arrêter un instant. Pourquoi ce qui peut paraître anodin prend-il une telle importance pour Nicolas Sarkozy ? Pourquoi, pendant des mois et jusqu’à la rédaction de ce livre, a-t-il ruminé cette scène à vrai dire insignifiante ? Qu’attendait-il du couple Hollande-Trierweiler ? Qu’ils agitent des mouchoirs en écrasant une larme tandis que la voiture du couple Sarkozy passait les portes ? La susceptibilité d’un animal politique aussi cuirassé que Sarkozy ne devrait pas être aussi exacerbée vis-à-vis d’un adversaire politique qui n’est pas son ami et ne le sera jamais… Il ne lui vient pas à l’esprit que François Hollande n’y a sans doute pas prêté la moindre intention. D’ailleurs, Hollande sourit, en privé, de cet épisode et a prévenu ses équipes de bien faire attention à traiter Sarkozy avec tous les égards quand celui-ci vient à l’Élysée lors des consultations présidentielles aux chefs de parti.
« Tonton » et tonton flingueur
On peut sourire mais c’est pourtant ici la principale différence entre Sarkozy et Hollande : l’homme de Neuilly est et sera toujours un affectif, l’homme de la Corrèze est et sera toujours un sympathique de surface qui masque un homme de glace. Même d’un adversaire, Sarkozy attend un signe d’humanité, de reconnaissance, signe d’une faille affective profonde venue de très loin. Hollande, lui, n’en a que faire. Sarkozy sera fidèle en amitié jusqu’à soutenir des gens pris dans les affaires (il a un mot sympathique pour Guéant ou pour Alain Carignon). François Hollande, lui, coupera net les branches pourries. Sans jamais se retourner, quitte à se montrer ingrat avec ceux qui l’ont servi jusqu’à se damner. « Sarkozy obéit à un mot d’ordre : je suis qui m’aime, analyse l’un de ses plus proches collaborateurs. Cela vaut donc pour son vieil ami Patrick Balkany. »
Il y a du « Tonton » chez Sarkozy, et du « tonton flingueur » chez Hollande. Contrairement aux apparences, « Sarkozy ne sait pas tuer en politique ; il blesse seulement », disent ses amis à droite. Hollande, lui, est un étouffeur de première, qui élimine au pistolet silencieux. L’image publique de ces deux hommes – l’énervé et sec Sarkozy, le sympathique et joufflu Hollande – est à l’opposé de leur personnalité profonde.
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Source : Gros plan – Google Actualités