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"Hollande peut utiliser ce remaniement pour faire bouger Merkel" – Le Nouvel Observateur

Manuel Valls a annoncé lundi 25 août la démission de son gouvernement après les déclarations de son ministre Arnaud Montebourg sur la ligne politique de l’exécutif.

Stéphane Rozès, président de CAP et professeur de sciences politiques à Science po et HEC livre au « Nouvel Observateur » son analyse sur la crise que secoue le sommet de l’Etat. 

Peut-on parler de crise politique ou même de crise de régime ?

– On n’est ni dans une crise de régime, ni dans une crise politique. On est dans une crise de nature différente, une crise de sens. La situation actuelle en est le révélateur mais elle offre également des opportunités pour dessiner plus clairement la situation de la France.

A la veille du Conseil européen, ce remaniement est l’occasion pour dire aux partenaires européens, et essentiellement à la chancelière allemande, que la France ne renonce pas à faire des réformes structurelles. Qu’elle n’utilise pas non plus l’Europe pour justifier un immobilisme mais que l’Allemagne doit être consciente qu’on ne peut mener à bien des réformes au travers d’une politique de l’offre au plan national que si il y a une politique européenne de relance. La faisabilité des réformes, avec le risque de déflation, est en cause. De ce point de vue là, l’interview d’Arnaud Montebourg pose des questions réelles. Le remaniement est lié davantage à la méthode choisie : Arnaud Montebourg devait participer à un gouvernement de combat et il en faisait un gouvernement de débat.  

Il n’y avait pas d’autres solutions que cette démission du gouvernement ?

– Il n’y avait pas d’autres solutions. Si les mots ont un sens, si l’éthique de responsabilité a un sens, il ne pouvait pas en être autrement. Arnaud Montebourg est suffisamment fin politique pour s’être douté de la réplique que ses déclarations appelleraient. Mon intuition est que, entre ses positions lors de la primaire et sa participation au gouvernement, il avait forcément en tête un scénario à la Chevènement.

A vous écouter, ça arrange tout le monde ?

– Cela peut profiter à Arnaud Montebourg, à partir du moment où, hors du gouvernement, il sera toujours sur la ligne de crête qui était la sienne au sein du gouvernement. Et cela peut profiter à François Hollande et à Manuel Valls, si ce remaniement est l’occasion de faire le récit aux Français de l’articulation entre le redressement français et la réorientation européenne. C’est le moment pour le président de la République d’utiliser, tel un judoka, ce remaniement pour faire bouger la chancelière allemande.

Berlin a d’ailleurs refusé de commenter la démission du gouvernement français…

– C’est de bonne diplomatie que de ne pas peser sur la vie politique française, elle le fait déjà suffisamment dans toute l’Europe au plan économique ce qui a de facto les conséquences que l’on sait.

L’imaginaire allemand juge les gouvernants quant à leur capacité à prendre en charge un effort salvateur. Ils regardent donc en France à travers un seul critère : est-ce que le pouvoir actuel en France est en capacité de faire des réformes structurelles ? Cet imaginaire allemand empêche l’Allemagne de voir que la somme des efforts demandés à chacun des pays européens entraîne une déflation. Ce qui ne permet pas à l’Europe de déployer son génie et la conduit au déclin depuis 15 ans.

Paradoxalement, c’est aussi ce que dit Christine Lagarde, à la tête du FMI… 

– Le premier a avoir exprimé cette position était Barack Obama, s’adressant à l’Europe, et particulièrement Angela Merkel, quand il a expliqué que les pays en déficit avaient des devoirs mais que les pays en excédant avaient des obligations.

L’Europe et même le monde n’ont pas beaucoup d’autres choix que de convaincre Angela Merkel que l’orientation qu’elle choisi nous emmène collectivement dans le mur.

Ces deux gauches, incarnées par Manuel Valls et Arnaud Montebourg sont inconciliables ?

– Cela ne correspond pas à la réalité du pays. La classe politico médiatique et le parti socialiste font comme si il y avait d’une part une gauche de la redistribution et de la politique de la demande, et de l’autre une gauche avec une politique de l’offre et de la compétitivité des entreprises. Ce n’est plus la vraie ligne de partage du pays. Tous les Français souhaiteraient que notre modèle social et républicain puisse perdurer.

Ce qui distingue la gauche de la droite ce n’est pas le souhaitable, c’est le possible. La gauche pense que c’est possible au risque du conservatisme social et d’un long déclin. La droite pense que ce n’est plus possible. Si François Hollande l’a emporté en 2012 c’est que sa posture, son projet et sa phrase « la France n’est pas le problème, la France est la solution », semblait dire qu’il était possible de nous réformer sans remettre en cause notre modèle. Marine Le Pen émerge parce qu’elle dit que la solution est la France dans la France.

Il n’y a pas deux gauches, il y a une lecture ancienne de ce que sont les clivages à gauche et il y a les vrais sujets du pays. Les dernières élections n’ont par exemple pas profité à la gauche de la gauche.

Propos recueillis par Estelle Gross – Le Nouvel Observateur (le 25 août 2014)

Source Article from http://tempsreel.nouvelobs.com/politique/20140825.OBS7133/hollande-peut-utiliser-ce-remaniement-pour-faire-bouger-merkel.html
Source : Gros plan – Google Actualités

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