L’instruction de démissionner donnée par Silvio Berlusconi aux ministres de son parti a fait tomber, samedi 28 septembre, le gouvernement italien : une fois de plus, cet homme que les Italiens ont continué à plébisciter pendant des années, n’hésite pas à jouer à la roulette l’avenir de son pays, de l’Europe et du monde. Se considérant au-dessus de la loi et des juges, il estime qu’un jugement d’un tribunal italien qui l’a condamné pour fraude fiscale mérite une crise politique et une menace européenne. Plus égocentrique que ça, tu meurs.
Ce type même d’attitude démontre à quel point Silvio Berlusconi fait passer ses problèmes personnels avant le bien de son pays. Il était cette semaine à New York pour convaincre, selon le Financial Times, que l’Italie était « jeune, vigoureuse et crédible ». On est sidéré d’un tel cynisme. Trois jours après avoir vanté son pays, il provoque une crise politique qui va remettre l’Italie à l’avant-plan des préoccupations européennes. Non content de retirer ses ministres, Berlusconi demande ce dimanche de nouvelles élections.
On ne joue pas avec la confiance « Cavaliere » quand on prétend être un politicien responsable.
Un endettement croissant
Depuis le début de la crise de l’eurozone, c’est l’Italie qui présente le plus gros risque d’explosion de l’Europe. Berlusconi, Monti et Letta n’ont rien fait pour l’atténuer. Aucun pays européen n’ose élever la voix pour forcer le gouvernement italien à adopter le type de mesures qui s’imposent pour renverser la tendance à l’endettement croissant. Lâcheté ou compromission ?
Avec une dette qui excède 2 075 milliards d’euros et atteint 17 % du produit intérieur brut national (PIB), l’Italie est le deuxième pays le plus endetté de l’eurozone, après la Grèce, tant en montant absolu qu’en part relative du PIB. Dans les prochains douze mois, l’Italie devra refinancer 250 milliards d’euros de dette publique. A cela s’ajoutera le financement d’un déficit budgétaire dont on espère qu’il ne dépassera pas 3 %.
Des tauxd’intérêt en hausse constante
Après avoir été jusqu’à 3 % au-dessus des taux italiens, l’Espagne a des rendements inférieurs à l’Italie. Tandis que les Espagnols mettaient de l’ordre, le Tesoro continuait à emprunter à des durées courtes pour éviter de gonfler le déficit budgétaire.
Sa dernière émission à dix ans lui a coûté 4,50 % pour 3 milliards d’euros. Vendredi, les obligations clôturaient à 4,62 %. Ce n’est pas tenable. Le ministre des finances, Vittorio Grilli, le sait.
Le président de la Banque centrale européenne (BCE), Mario Draghi, le sait également. Il s’est engagé à faire ce qui était nécessaire pour soutenir la dette italienne. Le problème, c’est qu’il n’en a pas les moyens. Personne ne peut résister à une déferlante de spéculation sur 2 000 milliards d’euros d’obligations. D’autant plus que l’effet de domino affecterait immédiatement la France.
Un système bancaire vacillant
Les banques italiennes ont emprunté 250 milliards d’euros à la BCE, soit 25 % du montant émis par l’institution. Ces montants devront être remboursés dans les dix-huit prochains mois. Les banques italiennes n’ont pas le premier liard nécessaire pour faire face à ce remboursement.
On ne sera pas surpris de voir que des rumeurs circulent sur la création d’une nouvelle tranche d’opérations de refinancement à long terme (LTRO), ce qui maintiendrait la BCE dans sa position de soutien indispensable du système bancaire italien, recyclant les excédents de dépôts des banques allemandes, en héritant au passage du risque bancaire italien.
Les banques italiennes sont maintenant à cours de collaterals, à savoir des actifs à mettre en garantie contre les dépôts de la BCE. Monte Dei Paschi di Siena, la troisième banque italienne et l’ancien mont de piété créé au XVIe siècle, a déjà du être renfloué par le gouvernement italien.
La combinaison de ces facteurs risque de remettre en question la solidité de l’eurozone, chèrement gagnée depuis quelques mois. « Cala il sipario sul buffone di Roma », écrivait la presse italienne en reprenant le titre du Financial Times, le 2 août, lors de la confirmation de la condamnation de Berlusconi. « Le rideau tombe sur le bouffon de Rome. » Il semble avoir d’autres tours dans son sac.
Source Article from http://finance.blog.lemonde.fr/2013/09/28/lirresponsabilite-de-silvio-berlusconi-continue-a-menacer-leurope/
Source : Gros plan – Google Actualités