La phase de concertation sur la réforme des retraites entre dans sa dernière ligne droite cette semaine, mais le gouvernement ne dévoile ses choix qu’au compte-goutte. Aujourd’hui et demain, onze organisations syndicales et patronales seront reçus par Jean-Marc Ayrault pour se voir dévoiler les grandes lignes du projet – sauf en matière de financement, le débat entre hausse des cotisations et hausse de la CSG n’étant pas encore tranché.
Premier reçu ce matin, le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, a tout de même reçu quelques assurances de la part du Premier ministre : «D’ici 2020, il n’y aura pas de modification des règles de calcul des retraites», a-t-il assuré. Autrement dit, pas d’allongement de la durée de cotisation : celle-ci suivra simplement l’évolution prescrite par la réforme de 2003, soit un partage des gains d’espérance de vie entre le travail (deux tiers) et la retraite (un tiers). La durée de cotisation devrait ainsi atteindre 41,75 ans en 2020. Au-delà, cependant, la formule pourrait être reconduite, voire durcie. Pour Laurent Berger, il est cependant «hors de question» de dépasser une durée de 43 ans à l’horizon 2035.
Deuxième certitude : il n’y aura pas «de baisse des pensions, ni de gel». Ce qui exclut notamment leur sous-indexation, consistant à faire augmenter les pensions moins vite que l’inflation. En recourant à ce procédé pour les retraites complémentaires, les partenaires sociaux avaient semblé ouvrir la voie à une solution similaire pour le régime général. Avant de dissocier soigneusement les deux dossiers. Selon Laurent Berger, le gouvernement prévoit tout de même de faire contribuer les retraités à la réforme à venir, selon des modalités à préciser.
Les avantages propres aux fonctionnaires et aux régimes spéciaux seront également préservés. Il n’est notamment plus question de faire passer de six mois à dix ans la durée sur laquelle est calculé le salaire de référence des agents publics, et donc le montant de leur pension. Gouvernement et syndicats soulignent le faible écart entre les pensions publiques et privées, et l’alignement progressif déjà acté par les précédentes réformes. Au grand dam du patronat, qui voit dans la réduction de cet écart une source d’économies conséquentes. Les fonctionnaires seront néanmoins concernés, au même titre que les salariés du privé, par les éventuelles hausses de prélèvement ou de durée de cotisation.
Mystère sur le financement
Si l’on connaît donc les mesures écartées, le contenu positif de la réforme reste encore à dévoiler. Principale annonce : un compte pénibilité verra bien le jour. Les salariés exposés à des facteurs de risques accumuleront des «points» convertibles en retraite précoce ou en formation permettant un changement d’activité. «Ce qui n’est pas fixé, c’est le nombre d’années requises pour avoir une réparation», a expliqué Laurent Berger, réclamant «un an de réparation pour dix ans d’exposition». Autres mesures acquises : la réforme des avantages familiaux au bénéfice des femmes et la prise en comptes des années d’apprentissage dans les droits à la retraite.
Ces premières annonces n’ont cependant pas levé le voile sur l’aspect financier de la réforme. Les besoins sont conséquences, puisqu’il s’agit de trouver environ 7 milliards d’euros pour combler le déficit du régime général d’ici 2020. Les principales pistes sont une hausse des cotisations, qui concernerait salariés et employeurs, et une hausse de la CSG, qui concernerait les actifs comme les retraités et ferait contribuer le capital. «Les arbitrages ne sont pas faits sur le financement donc nous ne les connaissons pas», a déclaré Laurent Berger, disant privilégier une hausse de cotisation.
A l’inverse, le patronat montera au créneau contre toute hausse de prélèvement, qu’il s’agisse de financer le régime général ou le compte pénibilité. «Nous sommes tout à fait opposés à une augmentation des cotisations sociales pour les retraites parce que nos entreprises aujourd’hui n’en ont pas les moyens» a expliqué le patron de la CGPME, Jean-François Roubaud, reçu à Matignon après Laurent Berger. Il s’est cependant dit prêt à accepter une hausse de la CSG des retraités pour en aligner le taux sur celui des actifs (de 6,6% à 7,5%).
Le président du Medef, Pierre Gattaz, s’est en revanche félicité d’avoir obtenu une «ouverture» avec une «réflexion» du gouvernement sur une baisse du coût du travail, qui pourrait compenser une hausse des cotisations sociales pour financer les retraites. «Il y a une ouverture qui nous a été faite, intéressante, c’est la baisse du coût du travail», a déclaré le patron des patrons à sa sortie de Matignon.
«Cette ouverture est intéressante car si nous arrivons à grouper un coût du travail qui baisse significativement (…) au delà du CICE (Crédit d’impôt-compétitivité emploi, NDLR), (…) si nous arrivons à faire ça avec le gouvernement, je dirais « bravo » et on pourra intégrer en effet des dizièmes de point de cotisations supplémentaires s’il fallait le faire pour régler quelques problèmes de retraite», s’est-il réjoui.
Derniers échanges
Les discussions se prolongeront jusqu’à demain, avec la réception des autres syndicats et organisations patronales. Ce rendez-vous doit clore la concertation sur la réforme des retraites, lancée lors de la conférence sociale du mois de juin, qui s’était poursuivie tout au long mois de juillet, d’abord avec le Premier ministre, puis avec la ministre des Affaires sociales. Les arbitrages finaux du gouvernement sont attendus dans les prochains jours, et le projet de loi définitif doit être présenté vers la mi-septembre.
D’ici-là, les syndicats CGT, FO, FSU et Solidaires seront descendus dans la rue pour «les salaires, l’emploi, les retraites et les conditions de travail». La CFDT, la CFE-CGC et la CFTC comptent, elles, sur la concertation pour faire passer leurs propositions sur les femmes, les métiers pénibles ou les jeunes.
Source Article from http://www.liberation.fr/societe/2013/08/26/dernieres-concertations-sur-les-retraites-avant-le-projet-de-loi_927057
Source : Gros plan – Google Actualités